Mai/Juin 2022 : La lettre économique de l’AFEDE

L’édito du Président

Cher lecteur,

Compte tenu de la flambée sans précédent du prix des matières premières, des composants électroniques et de la tension sur les approvisionnements, l’Afede a organisé le 10 mai 2022 une réunion au cours de laquelle l’économiste Alberto Balboni Responsable Economie International du Groupe Xerfi a fait une analyse rétrospective et prévisionnelle sur les consommations intermédiaires. Marc Pleuvy Responsable économique de l’Alliance des Minerais, Minéraux et Métaux a apporté une analyse sous l’angle de producteur de métaux. Ces dossiers sont disponibles auprès du Secretariat de notre Association.

La présente Lettre essaie de compléter l’analyse sous l’angle entreprises. Est-ce que les entreprises industrielles ont pu sauver leur marge même si la conjoncture a été favorable lors du dernier exercice ? Quelles sont les autres conséquences subies par les entreprises industrielles face à ces tensions liées aux métaux ?

Bonne lecture !

Désiré Raharivohitra

Président

Focus Inflation France

L’IPCH (indice des prix à la consommation harmonisé) ressort à +5,7 % en avril 2022 pour les ménages français*, et atteint un niveau historique. Avec un poids de seulement 9 % dans le panier moyen, la composante énergie représente en février une contribution de près de la moitié de l’indice, s’expliquant par un puissant effet prix, ceci avant même la guerre en Ukraine.

Si le prix du pétrole inquiète encore davantage avec le début du conflit ukrainien, le choc pourrait être encore plus important pour les entreprises, et notamment pour le secteur industriel.

L’indice des prix à la production de l’industrie était déjà en fort rebond en mai 2022 (+ 25 % sur un an). En cause notamment la progression en Europe du prix de l’électricité et du gaz naturel. Déjà tirés au plus haut fin 2021, par un puissant effet de rattrapage de la croissance économique post-covid, un hiver plutôt défavorable ainsi que l’arrêt en France de nombreux réacteurs nucléaires, la progression de ces trois énergies ressort début mars à des niveaux sensiblement supérieurs à ceux de mi-2008.

Il semble donc que nous soyons bien dans un 3ème choc énergétique en Europe, où les variations du pétrole (+70 % sur un an en euros) paraissent presque limitées au regard de l’explosion sur les marchés (les bourses d’échange) du gaz naturel, de l’ordre de X3 à X5 sur 1 an, et de l’électricité environ X4 à X7 sur 1 an, avec des profils très divers suivant les types de produits échangés et surtout des hausses d’autant plus importantes que les maturités (échéances de livraison) sont proches. Il convient d’indiquer que ces dernières énergies se stockent mal (gaz naturel), voire pas du tout (électricité) et resteront impactées par un prix du CO2 élevé. Seul point positif, depuis quelques jours une petite baisse d’environ 30 % simultanément sur ces 3 énergies, mais qui repose directement sur l’actualité du conflit ukrainien, tel que perçu par les marchés. Au-delà des fortes tensions de court terme sur les prix, la guerre en Ukraine questionne très directement la manière dont les entreprises françaises sécurisent leurs approvisionnements en matières premières.

*L’IPCH permettant à Eurostat d’effectuer des comparaisons entre pays révèle que l’inflation France est sur un an en avril 2022 la plus faible de la zone Euro (+7,4%), avec +7,8% en Allemagne, 8,3% en Espagne et +8,8% aux USA.

Olivier Reymondon

SNCF - Direction Stratégie & Finances – Direction des achats Groupe

Les secteurs des industries mécaniques sont analysés dans la présente étude pour illustrer la situation de l’ensemble des entreprises industrielles.

Les prix des métaux ont fortement bondi depuis novembre 2020

Métaux ferreux

Les prix des produits sidérurgiques ont augmenté significativement à partir de la fin de l’année 2020. Cette flambée des prix concerne toutes les catégories de métaux ferreux selon les indices de prix d’achats Mecastar – indices élaborés et publiés par la Fédération des Industries Mécaniques, qui synthétisent à la fois les prix d’achats auprès des producteurs et des distributeurs en France et les prix d’importations en provenance des pays membres de l’Union européenne et des pays tiers.

Les hausses les plus fortes à fin 2021 sont enregistrées par la tôle à chaud en bobine et par la barre ronde en acier allié. La hausse atteint respectivement + 126 % et + 66 % au mois de décembre 2021 en glissement annuel. Un bond de + 45 % a été réalisé par l’ensemble des produits sidérurgiques de décembre 2020 à décembre 2021, la hausse annuelle moyenne étant de + 37 % en 2021. Les prix continuent d’accélérer en 2022, surtout depuis le conflit en Ukraine.

Métaux non-ferreux

Parallèlement, on assiste à une forte augmentation des prix des métaux non-ferreux. La hausse moyenne entre janvier et décembre 2021 est de + 47 %. Quatre catégories des métaux enregistrent les hausses les plus élevées en glissement annuel : l’étain (+ 174 %), le chrome (+ 125 %), le molybdène (+ 108 %) et le nickel (+ 80 %). Les hausses des prix des métaux non-ferreux continuent de s’intensifier au premier semestre 2022.

Ensemble des métaux

Au total, les entreprises ont subi une hausse moyenne de + 42 % en 2021 par rapport à 2020. Cette hausse continue de s’intensifier. La pente de la courbe des indices des prix d’achats s’est fortement accrue entre février 2022 et mars 2022, traduisant entre autres les effets de la guerre en Ukraine. Une hausse de + 62,1 % a été enregistrée au mois de mars 2022 en glissement annuel selon les indices Mecastar.

Les conséquences pour les entreprises industrielles.

Les problèmes d’approvisionnement des produits métallurgiques et des métaux non-ferreux sont devenus nombreux et très aigus pour les entreprises industrielles. Ces dernières constatent, en plus de la flambée des prix, un allongement des délais d’approvisionnement ainsi que des ruptures régulières de stock et de pénurie des matières. Même si les délais arrivent en tête de liste des difficultés, certaines entreprises signalent aussi des problèmes logistiques et des problèmes de qualité. L’allongement des délais frappe toutes les catégories des métaux, aussi bien les métaux ferreux que les métaux non ferreux.

Les hausses des prix des matières et l’allongement des délais d’approvisionnement entraînent des conséquences très négatives sur l’exercice : hausse des prix de ventes et réduction de la marge. L’arrêt de production a aussi été cité par les entreprises industrielles, faute des matières premières. Cette situation pourrait même entraîner une fermeture d’usine selon certains chefs d’entreprise industriel.
Selon l’Insee, la hausse des prix à la production de l’industrie manufacturière française était de + 6,8 % en 2021. Or, avec l’augmentation des prix d’achats des matières de + 42 % en 2021, il aurait fallu une augmentation des prix de ventes industrielles de + 15 % en 2021 pour que les entreprises puissent stabiliser leur taux de marges nettes (résultats nets/chiffre d’affaires). En conclusion, malgré les formules de révision des prix pratiquées par la plupart des entreprises avec leurs clients, ou formule d’indexation des prix, les entreprises n’ont pu répercuter les hausses matières que partiellement en 2021.

Désiré Raharivohitra

Chef du Service Statistiques Economiques Fédération des Industries Mécanique

Stan

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